Femina n°22 suisse, le 29 mai 2005
BEAUTE. Elles ont une douzaine d’années, des rêves plein la tête dont une irrésistible envie de sortir de l’enfance. Le maquillage est un moyen… Mais est-ce une raison pour les laisser jouer du pinceau sans sourciller?
« Trop beau le gloss! » Pour Juliette, comme pour ses copines, la brillance est un must. Peu attirées par le fond de teint et le rouge à lèvres qu’elles trouvent trop couvrants, lles craquent toutes pour le mascara, le crayon – noirs de préférence – et certains fards à paupières pour autant qu’ils soient pastel. « Je veux que cela reste discret, souligne Mathilde, 12 ans, je n’ai pas envie d’avoir l’air d’une voiture volée. Je ne veux pas que tous les regards se tournent vers moi parce que j’ai mis du rose trop vif sur les paupières. » Loane approuve. Même si elle pique à Véronique, sa maman, son mascara XXL, elle se garde bien d’attirer les railleries des garçons dans la cour de récré. «Certaines en font trop, enchaîne Julie. On dirait qu’elles se cachent derrière le maquillage. Moi ce que je veux c’est être jolie, mais ne pas ressembler à une dame.»
Message reçu. C’est d’ailleurs elle qui a influencé sa mère. «Elle portait toujours du mascara marine ou brun; avec ses yeux clairs, le noir c’est beaucoup mieux. Elle m’a écoutée.» La mère approuve en riant. Intransigeante sur le soin (démaquillage, tonique. masque. crème hydratante et normalisante) et sur les circonstances du maquillage – oui pour une boum ou le week-end, plus rarement pour l’école – elle veille au grain. Pas question de laisser faire n’importe quoi!
Sociologue spécialisée dans les modes de vie et la consommation, Danielle Rapoport renchérit: «Offrir à sa fille une trousse conçue pour les très jeunes plutôt que de la laisser emprunter des produits d’adultes permet de positionner le maquillage.
Comme une initiation à la féminité ou pour rigoler entre copines. Et non dans une logique de séduction façon lolitas.» Cette transition en douceur permettra de ne pas brûler les étapes. «ll subsiste peu de rituels, note la sociologue. Le maquillage en est un qui stigmatise le passage de l’enfance à l’âge adulte, révèle l’autonomie.
GARE AU COPINAGE
Côté attitude à adopter, « il n’y en a pas d’idéale, nuance la spécialiste. Je ne parlerai pas d’harmonie, les rapports mères filles étant rarement idéaux, mais de partage.
Si l’ado se maquille pour une soirée, c’est normal. Si c’est tous les jours, cela devient un peu gênant. Surtout si elle porte des jeans taille basse et des petits hauts décolletés. Attention aussi au copinage excessif: l’ado, pour savoir qui elle est, a besoin de se détacher. Une attitude mère-copine peut avoir des effets pervers. »
Jouer du pinceau, est-ce se référer au modèle maternel? Apparemment non. Plutôt à un modèle d’ainée. Loane cite Jennifer, chanteuse issue de la Star Ac’, comme modèle. Mathilde, initiée par sa cousine de 13 ans. regrette que sa maman n’aime pas se maquiller. Stéphanie, au contraire, pense que sa mère en fait trop. Difficile de trouver le juste milieu.
Kit beauté et conseils de pro
Pour Laurence Dupraz, responsable de formation chez Yves Saint Laurent, la trousse idéale contient des gloss, plutôt dans les roses; du mascara; des crayons; pour l’été du bleu lagon, du turquoise, du vert d’eau, du violet clair; et pourquoi pas un rose à joues. Selon elle. l’erreur à éviter à tout prix? Se noircir les yeux à outrance. On sait que les ados le font pour se vieillir un peu mais cela leur ôte leur fraicheur. Elles doivent aussi éviter de surcharger les paupières. Souvent, elles superposent les couches de pastels Qui ne sont pas faits pour être opaques. Elles devraient plutôt profiler de la transparence des nacres. Crème hydratante ou non? Tout dépend du type de peau. Si elle est très fine et sèche. mieux vaut choisir un soin spécifique. teinté ou non, en pharmacie. Sinon. une crème hydratante fera l’affaire. Mais surtout elles ne doivent pas faire l’impasse sur le nettoyage qui sert aussi à débarrasser la peau de la poussière et de la pollution. Une routine quotidienne à laquelle il faut les éduquer.
L’AVIS DU DERMATOLOGUE
Non, l’utilisation de cosmétiques au tout début de l’adolescence n’induit pas une augmentation des consultations dermatologiques! Au contraire, Daniel Perrenoud, dermatologue, se réjouit d’un changement de comportements qui pousse les très jeunes à se soucier, dès 12-13 ans, de leur apparence, à prendre soin de leur peau. Il constate, moins qu’avant, des acnés gravissimes, non traités, laissant des cicatrices.
Ses conseils sont basiques: nettoyage minutieux de la peau à l’aide d’une solution antiseptique et recours aux lignes nettoyantes spécifiques visant à se débarrasser des impuretés, désincruster les pores, soigner les petites éruptions cutanées. ”Pour traiter puis dissimuler un bouton, il n’y a rien de mieux que ces petits sticks de pâte couvrante, proche du fond de teint, contenant un peu d’acide salicylique ou un autre principe antiacnéique. On les trouve en pharmacie, mais aussi en grande surface aux côtés d’autres produits destinés à assainir la peau: gels lavants, toniques, lingettes…
D’une manière générale, les cosmétiques, comme les soins, sont très bien tolérés. Le cosmétique gras, dit comédogène, a disparu. Et je ne constate aucune allergie aux mascaras ou aux fards à paupières.“
Source: Femina